Diagnostic des carences en minéraux chez les animaux d'élevage
Comme nous l’avons vu dans le module « Importance des carences en oligo-éléments chez les animaux» les carences peuvent se manifester sous deux formes : les carences cliniques et les carences subcliniques.
Les signes cliniques, sont assez généraux et parfois peu spécifiques pour certains : diarrhées, troubles cutanés, faiblesse des vaux à la naissance, myopathies dyspnées.
Les troubles subcliniques sont moins évidents à corréler avec des carences en oligo-éléments : faibles GMQ, troubles de la reproduction, mauvais départs en lactation etc…
Dans l’optique d’établir un diagnostic de précision, que ce soit en cas de troubles avérés ou en cas de bilan général de troupeau, des solutions, à mener en partenariat avec le vétérinaire existent.
Le statut en oligo-éléments peut être obtenu grâce à différents prélèvements : sang, lait, salive ou encore tissus animaux.
Prélèvement sanguin
Le statut sanguin en oligo-élément peut être obtenu de plusieurs manières :
- Directe, par mesure des concentrations plasmatiques des éléments : méthode de référence la plus souvent employée car simple à mettre en place sur le plan pratique.
- Indirecte en évaluant l’activité de certaines enzymes ou hormones dont le fonctionnement et la concentration dépendent d’oligo-éléments particuliers, ou en mesurant les concentrations de certains métabolites qui s’accumulent lors de carences (par exemple la T4 hormone thyroidienne reflet de la concentration en iode, ou encore la GsH-Px enzyme antioxydante reflet de l’apport alimentaire en sélénium d’il y a 2-3 mois) : cette mesure indirecte n’est cependant possible que lorsque les signes cliniques sont présents, c’est-à-dire que la carence est relativement importante.
Revenons en détails sur les avantages de la méthode directe de référence, c’est-à-dire la mesure des concentrations plasmatiques des éléments :
- Méthode standardisée donc répétable
- Méthode de dosage par torche à plasma couplée à la spectrométrie de masse ICP-MS, rapide et précise (Chappuis & Poupon, 1991; Lumet & Negriolli, 2007)
- Coût de l’analyse abordable en routine
- Analyse sur sangs individuels très fiable (et pas sur pool – mélanges de sangs où l’interprétation d’un mélange provenant de plusieurs animaux peut s’avérer difficile et eronnée)
Notons qu’il est important de faire réaliser ses prélèvements par un laboratoire indépendant : cela vous garantira l’objectivité des résultats et des interprétations.
Quelques précautions d’usage :
Plusieurs précautions dans le choix des animaux à prélever sont nécessaires : comme choisir les animaux en dehors du mois peri-partum, ou bien encore les animaux sains, de tout statut physiologique.
Le nombre minimum d’animaux à prélever varie donc selon les auteurs entre 4 et 12 (Herdt & Hoff, 2011; Kincaid, 1999; Oetzel, 2004). 5 est en général pratiqué.
Les tubes qu’utilisent les vétérinaires pour ce type de prélèvements sont particuliers : en effet, les tubes en verre ou ceux avec un bouchon en caoutchouc risquent de contaminer l’échantillon, en favorisant l’hémolyse ou en augmentant artificiellement le taux de zinc.
Les précautions à prendre lors du prélèvement sont claires : préférer la prise de sang à la jugulaire pour limiter les contaminations fécales et par les cellules musculaires. L’écoulement spontanée du sang dans le tube ouvert sera privilégié pour limiter l’hémolyse (éclatement des globules rouges).
Votre vétérinaire pourra vous proposer le service d’analyse ci-dessous :
100€ HT pour 6 oligo-éléments dosés sur 5 animaux (sangs individuels)
(Coût de l’analyse réalisée par un laboratoire public indépendant : le LEAV de la Vendée, sur méthode ICP-MS)
Prélèvement de tissus
Ces prélèvements permettent un accès aux différents organes de stockage des oligo-éléments.
La biopsie hépatique (= du foie) est très pertinente pour certains oligo-éléments comme le Cu, Zn, Fe, et secondairement Co, Mn et Se. En cas d’intoxications, elle peut s’avérer également intéressante.
En effet, lors d’une période de jeûne prolongé, un stress ou encore des phénomènes inflammatoires ou infectieux – même débutants – les quantités d’oligo-éléments stockés sont modifiées, et ce, avant l’apparition de tout signe clinique ou de toute variation des concentrations plasmatiques (Suttle, 2010). Bien que relativement facile à réaliser, la biopsie hépatique reste plus chère et plus lente qu’une prise de sang.
Prélèvement de lait
Pour l’iode et le sélénium, les quantités excrétées dans le lait sont le reflet du statut à court terme de l’animal. L’analyse peut porter sur un seul individu ou sur le lait de tank. Cependant, il peut exister des contaminations par des cellules sanguines qui fausseraient l’analyse (Guyot, Saegerman, Lebreton, Sandersen, & Rollin, 2009). De plus, lors de l’utilisation de produits de traite iodés, ce dosage est inutile car les produits augmentent artificiellement le taux d’iode mesuré (Meschy, 2010).
Autres prélèvements
Les profils urinaires et pilaires pourraient à première vue paraître intéressants de par leur simplicité de réalisation. Cependant ce ne sont pas les prélèvements les plus pertinents. En effet, les concentrations urinaires en oligo-éléments ne sont pas proportionnelles aux concentrations sanguines. Par exemple, les concentrations pilaires varient fortement selon la couleur : les poils noirs sont plus riches en zinc, les poils rouges sont plus riches en cuivre. Les poils sont par ailleurs très souvent contaminés par le milieu extérieur (lors de frottements au cornadis par exemple) et les poussières. Les concentrations pilaires en oligo-éléments dépendent donc plus de la couleur du poil, de l’âge de l’animal et du milieu extérieur que de son statut (Meschy, 2010; Siliart, 2011, 2014).